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Communication en Algérie : le sommet de l’iceberg n’est pas l’iceberg !

La communication quel que soit le domaine qu’elle couvre, ne peut être efficace qu’à l’intérieur d’un système dont elle tire sa légitimité et sa vision. Elle doit s’appuyer sur l’existant, le vrai, pour en donner la projection la plus remarquable possible. La communication n’est que la partie visible de l’iceberg ; à force d’être visible elle est perçue, par des organisations au benchmark amputé, comme le seul ingrédient à considérer. Ces dernières imitent les effets sans tenir compte des causes.

Dans le domaine commercial la communication ne vend pas mais elle assure un rôle de prévente : elle prépare les conditions et favorise une réaction positive du public. Mais le problème c’est que beaucoup de gens oublient que le processus de la vente dépend de plusieurs autres paramètres en rapport avec le mix marketing. Concrètement à quoi servirait la publicité si la distribution est défaillante, le prix est prohibitif ou le produit lui-même est inutile ? La communication n’a de sens que si elle promeut un mix marketing bien calibré et adapté au marché.

Ce que nous venons de voir vous fera surement deviner l’amateurisme (ou charlatanisme ?) de « l’expert » tellement confiant qu’il vous proposera d’être rémunéré après la réussite de sa campagne, comment peut-il garantir ses résultats alors qu’il ne gère qu’un maillon parmi d’autres ?!

Maintenant que nous sommes d’accord sur le fait que la communication doive faire partie d’une stratégie globale, examinons un cas pratique qui continue d’alimenter l’actualité économique dans notre pays : l’emprunt national obligataire.

Bien que nous soyons vraiment tentés d’analyser sémiologiquement cette campagne de communication (une autre fois peut-être), nous allons nous limiter à la dimension du présent article, la dimension stratégique. En nous basant sur les différentes déclarations des experts économiques, nous pouvons considérer que si cette campagne a échoué dans la mobilisation du peuple algérien autour du projet, c’est dû dans tous les cas à des facteurs marketing : caractéristiques du public non prises en compte, produit non adapté, nombreux freins à la consommation…

En effet, le peuple algérien n’a pas été séduit par le projet pour les raisons suivantes :

– Le rejet de l’usure : lorsqu’un individu prend sa décision par conviction religieuse, il ne sert à rien d’essayer de promouvoir un produit par la communication, ce qu’il faut c’est changer le produit lui-même ;

– L’inquiétude qui règne par rapport à la conjoncture politico-économique ; sur ce point même si la communication doit avoir un rôle majeur à jouer, si elle ne se base pas sur du concret elle ne serait que propagande et manipulation ;

– Vu qu’une grande partie des fonds qui circulent proviennent d’activités illicites, certains ont peur de se faire repérer, et cela en dépit des assurances fournies pour ce qui est de la non-justification des sources ; il y a ici un problème de confiance envers la parole du gouvernement, et sans confiance il n’y a pas de réaction positive ;

– Le manque de confiance dans le management des organismes et des projets publics ; là aussi il faut d’abord opérer le changement avant de communiquer dessus.

Peut-être que nous n’avons pas cité toutes les explications fournies par les experts et les médias, mais nous avons, en principe, démontré que la réussite de ce projet ne doit en aucun cas être la mission exclusive de la communication. Il y a des problèmes à résoudre avant de passer à la dernière phase.

L’exemple de l’emprunt obligataire peut être généralisé à une multitude de campagnes de communication, même dans le domaine social : en 2014 et suite à la mort du joueur camerounais Albert Ebossé, le ministère de la communication avait lancé une campagne de sensibilisation. Elle n’a rien changé aux comportements violents en Algérie ; la presse avait estimé que la campagne était un échec mais a omis de souligner que le fardeau devait être porté par plusieurs secteurs y compris celui des médias eux-mêmes.

La communication est un domaine très sérieux, souvent dévalorisé par des campagnes irréfléchies et même utopiques. L’absence de rigueur quant aux objectifs à atteindre et la négligence de l’évaluation du travail, portent atteinte à la crédibilité du métier. Pour commencer, il faut être lucide sur ce que la communication peut et ne peut pas.

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