A l’ère des réseaux sociaux, toutes les communications sont devenues sensibles. Au moment où plus rien ne garantit à l’organisation d’imposer ses propres « cadres d’interprétation », il devient de plus en plus facile de voir émerger une polémique, voire une crise. Une situation tout à fait banale peut, à cause d’interprétations généralisées par les réseaux sociaux, se lire à travers une perspective défavorable. C’est dans ces conditions que le communicateur doit évoluer.
D’après l’image que nous avons du métier de Bodygard (telle qu’elle est dépeinte dans le cinéma anglosaxon), il doit en permanence établir des scénarios. Quand il est sur le terrain, il doit observer son environnement, faire attention aux détails et imaginer ces derniers dans des scénarios qui mettraient en danger la personnalité protégée. Ensuite, il intervient par anticipation afin d’éliminer tous les risques.
Le chargé de communication à l’ère des médias socionumériques, doit être dans le même état d’esprit : scruter les détails (décor, individu controversé, graffitis, dynamique de groupe émergente…) et imaginer des scénarios qu’il faut éviter par des actions en amont. L’enjeu n’est plus l’intégrité physique de la personne protégée, mais plutôt les cadres d’interprétation qui peuvent s’emparer d’une situation donnée. Autrement dit, le chargé de communication doit en permanence, à fortiori quand il est sur le terrain (à la rencontre des médias et/ou du public), garder à l’esprit que la moindre erreur ou situation ambiguë peuvent se retrouver sur les médias sociaux.
Il faut quand même préciser que les nouveaux cadres d’interprétation ne sont pas toujours adoptés par le public. Par exemple, l’action qui a été lancée contre un spot publicitaire de Selecto, n’a pas suscité d’adhésion.
L’absence d’un communicateur « Bodygard », qui n’anticipe pas les situations sensibles, engendre souvent des polémiques et des badbuzz. Quand on regarde les deux images ci-dessous, leurs cadres d’interprétation semble évident pour tout le monde, surtout après la viralité qu’elles ont suscitée :
Sur la première photo, on voit deux ministres tenir une conférence de presse dans la chambre à coucher d’une dame qui vient de décéder du Covid-19. Dans la deuxième, des hauts responsables du temps de Bouteflika, partagent un gâteau symbolisant l’Algérie. Eviter ce genre d’erreurs peut paraitre facile, mais il ne faut pas oublier que les événements se déroulent rapidement sur le terrain, souvent avec des surprises et des initiatives externes. C’est pourquoi la communication doit être gérée avec une mentalité de Bodygard.
Enfin, rappelons que nous vivons dans une époque où il est impossible d’éviter la manipulation des cadres d’interprétation. Mais cela n’empêche pas d’être vigilant pour éviter de fournir les bâtons à des détracteurs. Car quand l’erreur vient de vous, il est plus difficile de vous défendre.