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Fièvre des influenceurs : le symptôme d’une gestion immature

Voilà quelques années que les marques algériennes se ruent vers ce qu’on appelle « les influenceurs ». Des gens célèbres, le plus souvent des jeunes, qui sont suivis par des millions de personnes sur les réseaux sociaux. L’argument est souvent le même : des « vues » et des ventes instantanées. Une démarche irréfléchie qui confirme ce que j’ai toujours répété :  le marché algérien de la communication a progressé dans la forme mais pas sur le fond.

Ce fond représente la maturité stratégique que la plupart des entreprises et des agences ne possèdent pas. Cela consiste, au risque de me répéter, à réfléchir au « pourquoi communiquer ? » c’est-à-dire trouver le moyen par lequel la communication doit soutenir ma stratégie. Au vu des bénéfices affichés concernant les “influenceurs”, le « pourquoi communiquer » tourne autour de retombées immédiates qui semblent satisfaire une vision naïve et superficielle.

Toute communication doit être observée par rapport à son effet immédiat, mais surtout par rapport à ce qu’elle va construire une fois qu’elle rejoint d’autres communications du même annonceur. Il est donc tout à fait possible de faire augmenter les ventes à court terme, tout en ruinant l’image de marque à moyen et à long termes. La communication via les « influenceurs » ressemble beaucoup à la promotion des ventes, la méthode marketing connue et reconnue. Cependant, la promotion des ventes ne souffre pas du risque d’affaiblir l’image de marque (sauf avec des offres défaillantes). Or, ce risque est très présent avec les « influenceurs ».

En effet, les « influenceurs », ceux qui sévissent en Algérie (ailleurs aussi mais ils ne m’intéressent pas), sont de véritables sources de scandales et de polémiques : déboires avec la justice, guerres infantiles, sens de la morale très discutable, matérialisme… sans oublier les considérations de branding : en tant que marque que pourrait m’apporter un porte-parole qui s’affiche avec tous les autres ? Incarne-t-il mes valeurs ? Représente-t-il des marques avec des valeurs opposées aux miennes ? Une liste de questions qui peut s’allonger…

Si l’on regarde du côté du développement des marques, comment une marque qui compte durer espère-t-elle traverser des générations qui, par nature, se moquent et ringardisent les idoles de leur adolescence ? Autrement dit, l’adolescent d’aujourd’hui, une fois adulte, comment verra-t-il la marque qui s’associe avec un « influenceur » qui sera perçu comme immature et idiot ? Bien sûr, il est possible de gérer cet équilibre à condition d’avoir un fil conducteur qui va construire l’image de marque à travers le temps. Et c’est de là que la vraie réflexion stratégique doit commencer.

Je ne peux conclure ce « coup de gueule » contre cette nouvelle débâcle de la communication en Algérie, sans introduire un peu de nuance : faire appel à de vrais influenceurs peut être bénéfique pour les marques, à condition de le faire dans une vision stratégique et à travers une étude minutieuse des profils et des risques.