Com & Web 2.0

Les footballeurs font-ils vraiment du bien aux marques algériennes ?

Nous le savons depuis longtemps, notre société vit une vraie crise de leadership. Les seules personnes respectées, surtout auprès des jeunes, sont les artistes et les footballeurs. Les marques l’ont surement compris, puisqu’elles se bousculent pour leur faire signer des contrats publicitaires. Mais est-ce vraiment bénéfique pour elles ?

Le phénomène du ralliement des stars de football par les entreprises algériennes, s’est accentué après la qualification de l’équipe nationale de football à la coupe du monde 2010. De nombreux joueurs de l’époque ont reçu des propositions de contrats publicitaires, à l’image de Rafik Saifi et de Mourad Megheni. Cette pratique était nouvelle et a été jugée déstabilisante pour l’équipe. L’ancien président de la FAF Mohamed Raouraoua est intervenu pour réguler les activités publicitaires de ses joueurs.

Le problème c’est que les entreprises algériennes n’intègrent pas suffisamment une réflexion stratégique quand elles font appel à des célébrités. Faire signer un Slimani, un Mahrez ou un Zidane est une finalité plus qu’un levier stratégique. Durant la fièvre qui a succédé à la qualification de l’EN algérienne en 2010, l’entreprise Bellat s’est affichée avec l’un des joueurs les plus polémiques de l’histoire du pays, Fawzi Chaouchi ! C’est pour nous le meilleur exemple d’une association non réfléchie.

Comment se fait-il que des célébrités quittent une entreprise pour ses concurrents ? Le cas du chanteur Baâziz passé de Djezzy à Nedjma est inacceptable du point de vue de la marque. Comment son contrat a été imaginé ? En parlant de contrat, qu’en est-il de celui qui lie Ooredoo et Rabah Madjer. Ce dernier était un commentateur pour une chaine sportive et s’appuyait sur ses acquis d’ancienne star du football. Fait-il du bien à Ooredoo, aujourd’hui qu’il est devenu un entraineur très critiqué ? Que prévoit son contrat par rapport à une telle situation ? Yacine Brahimi lui aussi s’est vu proposer un contrat publicitaire de la part de Condor, mais cette entreprise s’attendait-elle à ce qu’il accepte de jouer dans les territoires palestiniens occupés, entrainant une vive polémique ? Vous l’aurez compris, les juristes doivent être très prévoyants et pour l’être ils doivent connaitre les enjeux liés aux marques. C’est loin d’être le cas aujourd’hui.

L’affiche de djezzy qui accompagne ce billet est, quant à elle, symptomatique d’une erreur courante. Il s’agit de vendre la célébrité au lieu de vendre le produit. Quand Yacine Brahimi a été annoncé par Condor, le procédé de l’intrigue (teaser) a été adopté. Le jour du dévoilement du mystère, c’est forcément le joueur qui attire l’attention sur lui-même et non sur le produit. Le même constat s’applique à Mahrez qui vient d’être dévoilé par Djezzy. Dans ce genre de campagnes, le poids média doit être conséquent pour obtenir des résultats. Autrement dit, il faut durer assez longtemps pour que le public finisse de « s’exclamer » d’avoir découvert sa star préférée, et qu’il daigne regarder le produit. Mais là aussi c’est risqué, car la publicité peut perdre sa capacité d’attirer l’attention après plusieurs expositions, surtout en affichage statique.

Et qu’en-t-il des célébrités en tant que marques personnelles ? Les joueurs algériens ne sont pas connus pour savoir sélectionner leurs agents (pour gérer leurs carrières). Ils ne semblent pas l’être non plus pour gérer leurs images. Un joueur comme Mahrez, malgré ses exploits à l’international, n’a jamais réussi à obtenir des contrats publicitaires importants avec les grandes marques mondiales. Et il a peu de chances d’y parvenir à moins qu’il arrive à valoriser son image. Un footballeur ne doit pas penser uniquement à vendre son « apport » à une marque. Il doit surtout penser à ce que la marque peut lui apporter. Il doit la tirer vers le haut sans qu’elle ne le tire vers le bas. Dans ce cas, Rabah Madjer constitue un bon exemple : nous pensons que son image a été largement affaiblie du fait qu’il ait accepté trop de contrats peu valorisants, notamment dans le secteur de l’agroalimentaire.

Dans l’absolu, les stars du football algérien, ont un grand potentiel d’image qui peut booster les marques algériennes. Mais tout dépend de la capacité de celles-ci à l’exploiter judicieusement dans le cadre d’une stratégie de marque efficace.